Une interview à lire !


Pour son premier ouvrage jeunesse, Nicolas Schweitzer nous livre un conte à la fois sombre et enchanté qui dépeint un univers magique où se confrontent deux visions du monde et de la nature : celle d’une campagne simple et sincère qui se méfie d’une ville plus frivole et éloignée de la terre. Aux portes de Metz, Frida, jeune fille intrépide, est bercée depuis son enfance par les histoires extraordinaires de son père. En grandissant, elle comprend que ces fabuleux récits sur un mystérieux peuple tapi au fond des bois contiennent une part de vérité. Véritable ode à la nature et aux choses essentielles, cet ouvrage bouleverse nos savoirs et nos préjugés pour mieux nous reconnecter à un monde que l’on croyait perdu, à une nature ancestrale et enchantée plus proche de nous que l’on ne pourrait le croire.
BLE Lorraine : Quelles sont les raisons qui vous ont poussé à écrire ce livre jeunesse à destination de votre fille ?
Nicolas Schweitzer : « Il y en a plusieurs. La première est que je voulais lui offrir quelque chose qui lui permette de s’évader en se promenant dans les alentours, un univers pour stimuler son imagination. Je pense qu’on en a besoin à tout âge, mais particulièrement lorsqu’on est jeune. La seconde est que notre département a souvent mauvaise presse. Le tourisme est généralement lié à la guerre ou au passé industriel. Tout cela a sa raison d’être bien entendu ! Je voulais juste, pour ma part, proposer et mettre en valeur d’autres choses : notre relief, nos magnifiques forêts, nos rivières, nos vieux villages et notre vieille ville de Metz, et transmettre mon amour de tout cela à ma fille. Enfin, j’ai eu une enfance heureuse dans les années 1990, sans internet, sans ordinateur et sans téléphone portable, avec un temps passé devant la télé ou la console de jeux très modéré. Il y avait des vinyles, des livres, des cassettes, des CDs, on s’écrivait des cartes postales, on jouait dehors autant que possible. Et c’était franchement bien. Je n’ai que 33 ans mais je parle presque d’un autre monde. J’en ai une profonde nostalgie et je suis resté bloqué dans ces années-là. Bien sûr l’époque où se déroule Frida et le peuple de la forêt est bien plus ancienne que cela. Mais si je suis sans cesse tourné vers ce passé, qui est sans doute fantasmé et idéalisé dans le livre, c’est aussi pour faire passer un message à ma fille : la technologie, l’ère moderne, amènent bon nombre de progrès importants, comme par exemple la médecine, mais pour la vie quotidienne tout n’est franchement pas bon à prendre. Le bonheur se trouve ailleurs que dans les gadgets technologiques ou la consommation exacerbée, certaines personnes commencent à s’en rappeler, mais pas tout le monde ! »
BLE Lorraine : D’où vous est venue cette inspiration onirique du petit peuple de la forêt ? Avez-vous été bercé par les contes et légendes régionaux ?
NS : « J’ai découvert certains contes régionaux il y a quelques années mais je suis loin d’être érudit en la matière. Je naviguais plutôt dans un univers soit très réaliste, ou bien fantaisiste à la J.R.R. Tolkien. J’ai bien parcouru Grimm, Perrault, Andersen dans ma jeunesse, mais comme beaucoup je pense ! Ma fille a vraiment été le déclencheur de tout. La concernant, du coup, il y a fort à parier qu’elle sera plus imprégnée des contes et légendes régionaux que je ne l’ai été ! En ce qui concerne l’inspiration du « peuple de la forêt », elle me vient essentiellement de mes sorties en tous genres. Par exemple, je vais souvent courir très tôt le matin, parfois je débute avant l’aube, avec une lampe frontale. Vous vous retrouvez alors dans la forêt, avec cette faune nocturne qui profite des derniers instants d’obscurité, ces bruits, ces paires d’yeux qui vous observent, votre solitude et, il faut le dire, votre insignifiance. Je sais qu’il s’agit de rapaces, de rongeurs, de sangliers et consorts. Mais il suffit de s’imaginer autre chose, et cela devient encore plus inspirant ! Le « peuple de la forêt » se veut vraiment une poésie païenne, l’incarnation d’une nature bienveillante et onirique. Ce que beaucoup d’hommes bafouent. Ces mystérieux petits êtres ne s’y trompent d’ailleurs pas. Ils ne cherchent pas à entrer en contact avec les hommes. Ils savent que c’est vain pour la plupart d’entre eux. La plupart seulement car dans le livre ils viennent en aide à deux personnages. »
BLE Lorraine : Qu’est-ce qui vous fascine tant dans les paysages des Côtes de Moselle ?
NS : « J’adore la montagne et j’ai parfois l’impression de me retrouver dans les Vosges en me promenant dans les alentours. Les sentiers, les vieilles pierres, les pentes courtes mais parfois rudes, les forêts parfois profondes et denses. Et il y a de la poésie partout. Un crépuscule sur les ruines du Mont Saint-Germain, un lever de soleil où l’on surprend lapins et biches sur la pelouse calcaire. La journée, à la bonne saison, vous y trouvez quantité de plantes, de papillons, les orvets et les vipères qui font bronzette, le chant des oiseaux. C’est cliché mais j’adore cela. Aux périodes moins estivales il y a le froid, la grisaille, la brume, les seuls oiseaux qu’on entend sont les corbeaux et il règne la plupart du temps un profond silence … et contrairement à pas mal de monde, j’aime beaucoup cette atmosphère, plus mystique et austère. Elle est très inspirante. Plusieurs personnes trouvent d’ailleurs que Frida et le peuple de la forêt est un conte assez sombre et je ne leur donne pas forcément tort. C’est très imprégné de ces ambiances-là. D’ailleurs le fameux « bois noir », où vit le mystérieux peuple, est le nom d’un petit bois que l’on trouve près du Col de Lessy. Je ne suis pas allé le chercher bien loin ! »
BLE Lorraine : Avez-vous d’autres projets littéraires après ce premier ouvrage ?
NS : « Oui, tout d’abord et pour en rester à Frida et le peuple de la forêt, je raconte la jeunesse de plusieurs personnages par petits épisodes sur la page Facebook des « Contes du Pays Messin ». Comme mon livre est assez court, cela offre un petit supplément gratuit pour les lecteurs qui ont apprécié. Et bien sûr, il y a des révélations ! Mais Frida et le peuple de la forêt gardera toujours quelques zones d’ombre et c’est volontaire. J’essaie de livrer un épisode tous les quinze jours au maximum. Ensuite, l’écriture d’un deuxième livre est déjà commencée. Cette fois ce sera beaucoup plus long et j’espère que cela pourra paraître en début d’année prochaine. L’histoire est différente et indépendante de celle de Frida et le peuple de la forêt. En revanche, ça se passe toujours près de Metz et l’ambiance païenne sera toujours présente, peut-être même encore davantage. Et pour tout dire, un troisième livre est également dans ma tête, j’ai quelques lignes directrices mais c’est plus abstrait. Le style va encore demeurer le même. Mais là, ce n’est vraiment pas pour tout de suite. »

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Un bel article sur "Frida et le peuple de la forêt" !